La Saga de Gromdal
1. Prélude
Notre histoire commence lors de la chute de Kazad Brakak en l’an 1532 avant Sigmar, une des forteresses mineures environnant Karak Ungor, le Karak le plus au nord des Montagnes du Bord du Monde après Karak Vlag, la forteresse perdue. Assaillie de toute part par des hordes de Peaux Vertes ayant réussi à infiltrer les réseaux de mines, donnant ainsi accès à un assaut à la fois sous et sur terre, le Kazad ne pouvait résister, et finit par tomber aux mains de ses vils ennemis. De l’aide aurait bien pu venir de Karak Ungor, oui, mais c’était sans compter sur le roi du petit fort qui s’était cru au-dessus de ses réelles forces et, dans un moment de folie, avait refusé toute aide d’un autre Karak quel qu’il soit, fut-il commandé par le Haut Roi lui-même. Ainsi était la chute inévitable, le roi se refusant d’admettre son erreur des plus fatales alors même que l’épée rouillée du chef de guerre descendait sur sa tête pour tacher du sang royal le trône sacré de la forteresse.
Il y eut cependant quelques survivants : des membres des clans mineurs, des blessés ayant échappés par miracles aux détrousseurs gobelins, et, surtout, le fils du roi avec une petite partie du clan royal et d’un clan haut placé. Le jeune prince, réalisant toute l’ampleur de ce qu’avait causé l’ego du roi, était parti contre l’ordre de son père pour aller chercher de l’aide chez des Karak proches et avait emporté avec lui une forte garde pour prévenir des assauts possibles venant de l’avant-garde de la horde s’approchant lentement, mais sûrement, de la forteresse. Mais c’était sans compter le général de l’armée gobeline qui réussit à les retarder, envoyant une force conséquente sur la forteresse la plus proche de Kazad Brakak —où étaient allés le prince et sa troupe— afin de l’occuper pour qu’elle ne puisse aider la véritable cible de l’assaut avant qu’il ne soit trop tard. Cette technique ne réussit que trop bien car lorsque le fils du roi, sa garde et ses maigres renforts arrivèrent au Kazad, ils le découvrirent mis à bas et investi par les gobelins…
Longtemps, le prince hésita entre partir vers Karak Ungor, le sud ou jurer le Serment du Tueur. Dans un premier temps, il se sentit appelé à Grimnir, et ce avec raison : il avait désobéi à son père, qui était également son chef de clan et son roi, n’avait pas été là pour le protéger, lui et sa forteresse, et ne pouvait reprendre cette dernière avec ses quelques centaines de fuyards et de blessés. Mais, d’un autre côté, il ne pouvait se résoudre à abandonner ce qui restait de son peuple, d’autant plus que c’était déjà ce qu’il avait fait en allant chercher de l’aide au loin, et aussi parce que prendre le Serment du Tueur signifierai la fin de la lignée royale de Kazad Brakak, alors même qu’il avait déjà failli à son devoir envers sa lignée en n’étant pas là lors de la mort de son père et suzerain.
En fin de compte, son devoir envers son clan, sa famille et son peuple se révéla plus fort que l’appel du dieu de la guerre et des Tueurs, et le prince maintenant roi, mais sans royaume, se dirigea vers Karak Ungor avec les restes de son peuple brisé. Mais le roi dépossédé n’y trouva pas satisfaction, se jugeant trop proche de son ancien foyer alors qu’il était incapable de le reprendre, et il reprit la route en -1517 —peut avant la chute de Karak Ungor— pour descendre jusqu’à Karaz-a-Karak en passant par Karak Kadrin et par Zhufbar. Là il demanda asile au Haut Roi et la possibilité de rejoindre ses rangers car, selon lui, c’était la meilleure façon de se rendre utile en tuant du grobi. Le Haut Roi, Morgrim, le même qui fit fermer les grandes portes de Karaz-a-Karak, accepta sa requête. Il en vint même, après des années de bons et loyaux services, à lui offrir la main de la fille d’un de ses parents. La lignée des rois de Kazad Brakak ne s’éteindrait donc pas.
Ainsi, les survivants de Kazad Brakak trouvèrent refuge à Karaz-a-Karak, et prospérèrent même quelque peu, la lignée des rois survivant d’âge en âge. Puis, tout bascula lorsque le frère cadet de l’héritier du clan épousa une fille de Karak-a-Odro-Karaz, Karak-aux-Huit-Pics, et partit y habiter. Car c’était en -763, quelques siècles seulement avant la chute du grand fort du sud. Et, répondant aux messages d’aide des derniers habitants du Karak, plus particulièrement à celui de son frère, le désormais vieux seigneur à la tête du clan envoya l’ensemble de son peuple, ainsi que quelques autres clans qu’il avait réussi à convaincre, à Karak-aux-Huit-Pics, l’armée étant menée par son fils, Hagrim —car le seigneur était sur le seuil de la mort et donc incapable d’entreprendre un tel voyage pour prêter main forte aux derniers défenseurs du Karak.
Au final, ce fut une armée d’un peu plus de mille nains qui arriva à la citadelle. Un bien maigre renfort si l’on considère l’ampleur de l’assaut, et ce ne suffit justement qu’à retarder la chute de la forteresse rongée par les siècles de combats avec les grobi —gobelins— et les thaggoraki —skavens. Cependant, ce fut lors de ces combats qu’Hagrim sauva la vie d’un thane d’un clan local nommé Dramnir Barbenoire, chef du clan Byrnik. Une très forte amitié se lia entre les deux chefs de clan, qui s’étendit peu après aux clans eux-mêmes, au point que Dramnir, accédant aux demandes des deux jeunes gens, accepta de marier sa fille cadette à l’héritier de Kazad Brakak. Ainsi fut scellée l’amitié inébranlable qui lie le clan Byrnik à celui des rois de Kazad Brakak.
De cette heureuse union naquirent deux frères jumeaux : Hamnil et Dagrim. Ceux-ci, après la mort de Dramnir à qui succéda son fils ainé Thar, devinrent l’arme et le bouclier du thane du clan Byrnik, et firent la fierté de leur père qui mourut de sa belle mort peu avant la chute de la forteresse, mais non sans avoir uni ses deux fils avec des femmes du clan Byrnik. Quelques années plus tard, Thar et ses guerriers furent pris en embuscade par des Skavens lors d’une ronde dans une mine, jusqu’alors non attaquée. Il tomba au combat contre cinq rats-ogres, mais seulement après en avoir emporté quatre avec lui. Son, Godri, lui succéda.
Ainsi suivirent de longs mois où les attaques se faisaient toujours plus nombreuses, fréquentes et audacieuses. C’est alors que les skavens décidèrent de jouer leur dernière carte secrète et empoisonnèrent les puits de la citadelle, dernier refuge des nains survivants, causant la mort de plusieurs centaines d’innocents, guerriers, femmes et enfants, ne laissant que peu de bras valides pour défendre l’ilot de la citadelle. Parmi les victimes se trouvaient la femme et le nouveau-né de Dagrim. Ainsi, lorsque le vieux Lunn, dernier véritable roi de Karak-aux-Huit-Pics, donna l’ordre de sceller les tombeaux des ancêtres et de fuir, une poignée de guerriers resta pour offrir une retraite honorable à leurs frères, avec dans leur rang Dagrim. La légende dit que ce fut un des derniers guerriers à tomber sous les assauts des peaux-vertes et des skavens, mais qui de ces héros est revenus vivant du dernier carré ? Personne.
De leur côté, Hamnil et Godri, avec leurs clans respectifs, suivirent la longue marche des fuyards menés par le roi Lunn en direction de Karak Azul, pour finalement la quitter à une distance respectable du Karak tombé, car Godri voulait se fonder sa propre forteresse, et Hamnil ne pouvait se résoudre à abandonner son cousin. Les deux clans partirent donc dans les montagnes, à mi-chemin entre Karak Azul et Karak-aux-Huit-Pics. S’en suivit soixante années d’errance, au bout desquelles Godri trouva un endroit qu’il jugea propice à la fondation de sa future cité naine : le Col au Crâne. L’endroit était en effet le centre d’une grande forêt regorgeant de bêtes à chasser et les sous-sols des montagnes environnantes étaient loin d’être dépourvus de métaux précieux, à défaut de Gomril.
Ainsi, la construction de la forteresse commença et, en trois siècles qui virent la mort d’Hamnil —s’éteignant à l’âge plus que vénérable de trois cents et quarante-six années aux côtés de sa femme, non sans avoir laissé un fils et une fille, Bagrik et Ridka, dans la force de l’âge— il ne restait plus que les portes pour que la forteresse soit enfin terminée. Celles-ci étaient acheminées depuis Karak Azul, qui était au fil du temps et grâce aux amis de Karak-aux-Huit-Pics qui s’étaient installés là-bas devenue une alliée à la fois militaire et commerciale, et gardée par Bagrik ainsi qu’une bonne partie des guerriers de son clan —car les routes qui reliaient Karak Azul et le jeune Karak n’étaient alors pas sécurisées et semées d’embûches. Mais la forteresse, nommée Karak Grom —la Forteresse du Défi Éternel— par Godri, fut attaquée par une Waaaagh! gobeline et ne survécut que de justesse, et non sans de graves dommages : le Grand Hall s’était complètement écroulé et la force engendrée fit s’effondrer les salles des guildes en contrebas, les secousses se propageant dans les couloirs abimant les salles des clans et rendant impossible tout accès aux silos à grain. De plus, le bétail de la forteresse avait été dispersé dans les montagnes environnantes, et la forêt avait été presque entièrement brûlée.
Mais les nains étaient déterminés à survivre, même face à un hiver rude qu’ils devraient affronter sans réserves de nourritures et presque sans bois. Ainsi s’installèrent les survivants : déblayant les débris pour nettoyer les salles récupérables et organisant des parties de chasse pour récolter assez de viande avant qu’il ne soit trop tard, sans oublier le bois et les soins aux nombreux blessés. Un mois passa alors que l’automne avançait et devenait de plus en plus froid, annonçant cet hiver tant redouté… Et le salut arriva enfin, sous la forme du convoi venant de Karak Azul, avec à sa tête Bagrik, composé d’un centaine de guerriers du clan royal ainsi que d’une autre centaine de deux petits clans mineurs du Karak allié —avec parmi eux quelques survivants de Karak-aux-Huits-Pics, sans oublier quelques ingénieurs et les réserves de vivres que transportait le convoi
Bagrik fut acclamé en héros et reçut du vieux Godri son surnom qui lui resta jusqu’à lors : Bagrik le Sauveur. Aidé des ingénieurs et de la main d’œuvre que fournirent les nains de Karak Azul, la reconstruction recommença avec une énergie nouvelle et le peuple de Karak Grom réussit à survivre à l’hiver —et bien au-delà. En fin de compte, Godri offrit aux nains salvateurs de rester vivre dans la forteresse qu’ils avaient tant aidée au lieu de retourner à leur Karak d’origine, et peu d’entre eux refusèrent cette offre, tant les liens qui s’étaient tissés entre les habitants des deux cités étaient devenus forts.
Et c’est ainsi que la forteresse put se développer, cette dernière qui aujourd’hui encore se dresse fièrement, tel un défi lancé aux vils occupants de Karak-aux-Huit-Pics non loin de là. Mais c’est aussi dans cette forteresse que naquit Gromdal, fils de Darek, fils de Thrandim, futur thane du clan des Ungorrikki en l’an de grâce 2429 ap. Sigmar, d’après le calendrier des Hommes.